Pour en finir avec la « bien-pensance »

Il vous juge

Aujourd'hui, je dénonce.
« On en a gros » dirait l'autre. Et bien pour tout vous dire, oui, j'en ai gros.

Soyons clairs tout de suite. Si en lisant le titre vous vous êtes dit « Chouette, ces connards de gauchistes vont en prendre pour leur grade », vous risquez d'être déçu. Ce serait même plutôt vous qui risquez de morfler.

Cet article se veut un coup de gueule contre tous ces concepts pré-définis et soit disant universels qui servent de couverture aux accusations les plus foireuses et infondées. Cet article se veut un réquisitoire contre ces formules vides de sens et qui pourtant servent d'excuse à tous les mépris.

S'il-vous-plaît, arrêtez d'utiliser l'expression « bien-pensance ».

La « bien-pensance », c'est quoi ? C'est un concept qui permet à ceux qui l'emploient d'expliquer à leur interlocuteur que ses positions sont consensuelles et n'apportent a priori rien à la discussion si ce n'est des considérations sans intérêt. En employant la locution « bien-pensance », on sous-entend que la personne en face de nous se revendique justement comme porteur de la « bonne pensée ».

Il est là le problème.

En effet, dans les faits, ce sont pratiquement toujours les mêmes opinions qui sont qualifiées ainsi. Tout ce qui a trait aux droits de l'homme, à la défense des libertés individuelles, à l'antiracisme... a droit à son étiquette. En agissant ainsi, on signifie que ces concepts n'ont pas besoin d'être rappelés car évidents. Et que celui qui les ramène sans arrêt sur la table est un emmerdeur de première qui n'a rien compris aux vrais problèmes.

Si seulement. Si seulement ces concepts étaient évidents. Généralement, quand la personne en face de vous se sent le besoin de vous rappeler que le racisme c'est mal, c'est que vous avez dit auparavant quelque chose n'allant pas dans ce sens. Ne vous offusquez pas que l'on vous rappelle les règles de bienséance. Et si vous estimez que vous n'avez pas été raciste dans vos propos précédents, alors excusez-vous de vous êtes mal exprimé et reformulez ce que vous vouliez dire. Il y a sûrement eu un malentendu. Sûrement.

Par ailleurs, avec cette locution, on se pose en victime. On se considère comme faisant partie d'une minorité opprimée pour ses opinions. La fameuse police de la pensée serait à l'œuvre. Or, il faut savoir plusieurs choses. Déjà, la liberté d'expression en France n'a pour seule limite que la diffamation et la l'apologie de crimes, ce qui vous laisse tout de même un champ assez large. Ensuite, si vous trouvez des gens qui s'offusquent de ce que vous avez dit, sachez que lorsque vous exercez votre droit d'exprimer des idées « extrêmes », les gens qui vous écoutent ont de même le droit de signaler que vos idées les répugnent. Enfin, connaissant les résultats électoraux récents d'un certain courant de pensée se revendiquant justement comme victime de la bien-pensance, il ne me semble pas que les extrémismes soient muselés dans ce pays.

À moins que... le complot. Le système. L'intelligentsia politico-médiatique.

On entendra souvent les fâcheux se plaindre que nous sommes bercés par une pensée unique (que l'on pourra qualifier de « gauchiste » à l'occasion). En l’occurrence, il y a effectivement matière à discuter (vous voyez, je ne suis pas obtus comme garçon). En effet, il y a une forte collusion entre les grands patrons des groupes de médias traditionnels et les hommes politiques. Et les idées des extrêmes peuvent sembler absentes dans ces médias traditionnels en regard du poids politique effectif. C'est vrai. Néanmoins, il est offert régulièrement à nombre de « penseurs anti-systèmes » (notez bien les guillemets) des tribunes dans ces médias. On songera aux Éric Zemmour, Élisabeth Lévy ou la jeune pousse Eugénie Bastié, fraîchement arrivée dans le milieu.


 Je vous mets ça pèle-mêle. Qu'on ne revienne pas me dire que la parole est muselée.

Aussi, pour le bien de votre ouverture d'esprit, je ne saurais que trop vous conseiller de ne pas vous informer via un seul canal et de lire également des journaux/magazines/sites Internet avec une ligne éditoriale a priori éloignée de votre ligne de pensée. BFM TV toute la journée ce n'est pas sain pour l'esprit.

Au passage, soulignons l'effet pervers de cette expression. À force de hurler contre les bien-pensants, le risque existe que l'opinion se retourne et que la bien-pensance change de camp. Et sans même attendre cette inversion de polarité, il faut bien prendre conscience que tout ceci n'est qu'une affaire de point de vue, et que l'on court tous le risque d'être le bien-pensant de quelqu'un d'autre.

Profitons-en également pour en finir avec un autre concept absurde et préconçu : les bobos. Étymologiquement, on parle de  « bourgeois-bohèmes », à savoir en général des gens plutôt aisés avec des considérations décidément sans intérêt comme l'écologie ou la tolérance. Pour une définition plus précises, on pourra se référer à la chanson qu'un de nos plus grands artistes leur a consacré.

Les bobos, comme les bien-pensants, n'existent que dans les fantasmes de ceux qui emploient ces expressions. On ne peut pas utiliser des termes aussi vagues pour désigner une catégorie de la population et encore moins pour la juger. Car frapper quelqu'un du tampon de la « bien-pensance » ne constitue en aucun cas un argument valable pour étayer votre propos.

Car comprenez-moi bien. Votre avis peut être pertinent, l'est certainement même ; votre interlocuteur peut se tromper, sûrement même. Veillez simplement à ne pas disqualifier votre propos en usant d'une terminologie simpliste.

Concluons à présent avec une citation du chansonnier sus-mentionné :
« Ils ont des enfants bien élevés, qui ont lu Le Petit Prince à six ans. »  Renaud, Les Bobos
J'ai à titre personnel lu Le Petit Prince à six ans, et je suis issu d'une famille qu'on ne peut pas qualifier de « aisée ». J'ai des parents qui ont œuvré pour me délivrer un bagage culturel digne de ce nom, et je ne peux que les en remercier quand je constate où j'en suis aujourd'hui.

Cet héritage me rend fier, et participe de ma sensibilité politique. Je suis attaché à la justice, aux questions d'intégration et aux libertés individuelles. Alors oui, si vous voulez, je suis un bien-pensant.  Et si cela me permet de me distinguer, vous me permettrez de le revendiquer.

Commentaires

  1. Je n'ai lu que le début mais, à mon avis, la bien-pensance est le reproche qu'on adresse aux donneurs de leçon.

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